C’est l’Automne. J’ai cinq jours à perdre et une furieuse envie de bouger. Yuri (mon Ural Ranger) me fait les yeux doux, ma Rallye (la 1200 GS) aussi… J’ai tranché. Vu que ma BMW aura droit au bac à sable en novembre c’est au tour de Yuri de profiter des joies (et peines) de la route ! Une vidange, un réglage des jeux de soupapes, et une synchro plus tard, me voilà en train de charger Yuri. J’ai du nouveau matos de bivouac à tester, l’occasion est trop belle.
Lundi,
Départ au petit matin, direction le col du Galibier passage obligatoire pour m’évader loin de la maison.
La lumière d’automne est magnifique et me met de très bonne humeur pour la semaine.
Au col, la vue sur la Meije est toujours aussi spectaculaire, la descente au top.
Je rejoins rapidement Grenoble que je m’empresse d’éviter pour rejoindre le Vercors. Je n’ai pas pris de carte et j’avance au feeling, dès qu’un panneaux ou une route me plait, j’y vais.
Une fois grimpé sur le plateau, une déviation m’emmène sur une petite route qui rejoint la Chapelle en Vercors. L’occasion de visiter les ruines de Valchevrière et son histoire tragique des maquisards du Vercors.
Je repars bon train, profitant des paysages sublimes que peut offrir ce massif.
Alors que j’enchaine cette petite route qui cours à travers une forêt de sapins, je négocie un virage en devers avec un peu trop d’enthousiasme et termine dans l’herbe à quelques centimètres du talus. Une bonne suée froide, juste pour me rappeler que l’excès de confiance se termine toujours par un rappel de Youri aux lois inéluctables de la physique…
Je me pose un peu plus loin pour souffler dans un troquet à l’accueil parfait, un habitué me parle d’Ural et me demande si la route n’est pas trop compliquée avec, je ne dois pas être le seul à me faire surprendre…
J’enchaine divers cols dont j’ai oublié le nom, excepté le dernier qui me met en appétit.
Je traverse la vallée du Rhône et remonte “en face“, je croise un Attelage à l’entrée de gorges “tiens, la première Ural du périple !“
Je remonte une petite vallée balisée pour la célèbre course cyclo sportive de l’Ardéchoise et débouche sur des plateaux en altitude.
Il se fait tard, je trouve sans peine un coin pour passer la nuit. le bivouac posé, la soupe est vite avalée puis je m’enfonce dans mon duvet sans demander mon reste.
Mardi,
La nuit fut fraiche, mais l’équipement que je trimbale a prouvé son efficacité. Je valide pour les virées futures.
Je sort de ma tanière et rejoint le goudron, une courte montée m’impose de craboter la roue du panier car la rosée du matin a rendu la piste terriblement glissante. Youri s’en sort à merveille même si je dois garder suffisamment de gaz pour éviter de caler.
Je passe le col de la Fayolle pour rejoindre le Mont Gerbier de Jonc. Une petite piste se dessine sur la gauche, je décide d’aller voir ou elle mène.
Alors que je fait des photos du plateau ou pose fièrement Yuri, je m’aperçois qu’une coupelle se balade sur l’axe de la roue arrière. Fini la piste, je sort les outils et analyse la situation. Rien de grave, la vis qui tient le roulement est desserré et a rongé la coupelle. Je n’ai pas vérifié son serrage lors du changement avec la roue de secours, c’était une erreur.
Je change mes plans (en fait, j’en élabore un) et décide de rejoindre Manzat, ou siège Dan, un mystérieux chaman spécialiste des Ural et qui aura surement de quoi me dépanner…
Je file au nord, m’arrête aux Estables chez un vieux pote pour me réchauffer autour d’un café et consulter une carte. Je mémorise les directions à prendre et reprend la route.
Début d’après midi, me voilà à me battre avec mon Smartphone pour dénicher le téléphone ou l’adresse du bouclar quand un équipage en Ranger s’arrête derrière moi pour me saluer
– tu vas chez Dan ?
– ouais mais j’sais pas ou c’est.
– On en revient, suit nous on t’y emmène.
– cool, merci les gars !
15 mn plus tard, je suis devant l’antre mais elle est vide. Zut, je n’avais pas prévenu.
Un coup de fil au numéro affiché sur la porte et voilà Valérie qui apparaît. Elle est désolée, le chef n’est pas là mais me trouve la fameuse coupelle et en dix minutes, l’affaire est réglé.
J’écoute ses quelques conseils pour améliorer Yuri et profite de l’occasion pour faire le plein de lubrifiant plus quelques bricoles. L’atmosphère qui règne là dedans et au delà de ce que j’imaginais, deux pistons attendent sagement sur une table, ça sent le 850 à plein nez…me laisserait bien tenter un jour !
Je repart sur la route sans omettre de laisser une p’tite bouteille de Genépi pour la remercier de sa gentillesse.
Un panneau m’invite à voir le méandre de Queuille, je rejoins le belvédère qui domine cette curiosité.
Plus loin, c’est une vielle borne Michelin qui me permet de voir l’incroyable viaduc des Fades.
Une heure après, je m’enfonce dans un bois pour monter la tente. Encore une journée riche de rencontres et bien remplie. Je m’endors en quelques secondes.
Mercredi,
Ce matin, je me réveille sous une petite pluie. J’avale un rapide petit dèj et plie le camp en vitesse. Je rejoint le goudron et décide de partir cap au sud vers Ussel. J’ai décidé de rejoindre Thierry, un ami qui habite dans le Périgord. C’est un grand voyageur à moto avec qui je rêve d’échanger sur nos diverses expériences. Il part en Mongolie jusqu’au lac Baïkal au mois de mai. Je suivrai sa route 3 mois plus tard, mais pousserai jusqu’à Vladivostok. Les infos qu’il va recueillir me seront d’une grande aide.
Je trace au plus court, mais dès fois cela ce termine au milieux des champs. Qu’importe, pour Yuri, tout est possible ! Bon, c’est pas terrible pour la moyenne horaire mais super beau…
cette petite pluie reviens sans cesse et la protection de l’Ural est inexistante mais c’était mon choix. Et malgré le froid qui m’engourdit, je ne souhaite pas revenir dessus. Un Ural, ça se monte à cru. Brut de décoffrage tel qu’il est sorti d’Usine, à la Russe. Mais comme un con, j’ai oublié l’accessoire indispensable pour tenir le rythme quelque soit le terrain ou les températures : la Vodka !
J’arrive sur Lalinde en fin de journée, le soleil fait une timide apparition. Le reste de la soirée sera consacré à des discutions sans fins sur les pays de l’est et la prépa des voyages. Une petite escapade au resto permettra à Thierry de tester le caractère toujours aussi imprévisible de Yuri.
Jeudi,
La nuit fut courte mais bien réparatrice. Il est temps de partir et surtout de prendre la direction de la maison, je dois être de retour dans deux jours. Je repart dans un épais brouillard, et décide de rester sur les axes secondaires. Pas de nationales avec Yuri, je ne me sens pas assez en sécurité. La Dordogne regorge de château en tout genre, l’occasion pour Yuri de prendre la pose.
Je bénis les poignées chauffantes installées juste avant mon départ, elles sauvent mes doigts du froid de plus en plus vif. Je passe la chaine des Puys non sans oublier une petite piste de temps en temps, et file en direction du beaujolais.
Je passe visiter un pote qui est impatient de découvrir Yuri.
J’arrive à la nuit tombée, il m’attend en trépignant. J’ai à peine le temps de souffler de mes dix heures de route qu’il est déjà dans le panier ! Nous voilà reparti pour un petit tour dans la montagne. Je lui passe le guidon et de suite le charme s’établit : il est aux anges ! Retour chez lui, et bizarrement quand je reprend les rênes il devient terrorisé maintenant qu’il a saisit la difficulté de mener cet attelage. J’ai beaucoup progressé ces derniers jours et je me surprends à négocier chaque courbe pile poil à la bonne vitesse.
La soirée bien arrosée ajoutée aux 500 bornes de la journée me font passer la nuit d’une seule traite.
Vendredi,
Dernier jour de balade avec Yuri, la lumière du matin est magnifique dans le vignoble.
Je trace à travers les petits villages et les marais pour rejoindre Chambéry. Le col du chat est gravi avant de plonger sur le lac du Bourget et remonter la vallée de la Maurienne.
Les vibrations ont eut raison de mon support de jauge de température. Une petite cordelette me permet de réparer vite fait. Il faudra fabriquer un truc plus solide à la maison.
Me voilà rendu à Valloire. Yuri franchi la barre des 4000 kms, que de plaisir depuis les deux mois que je l’ai. Le moteur s’est libéré pendant le voyage ainsi que le pilote. Maintenant, on se comprend mutuellement et je sens que ce n’est que le début d’une grande aventure…